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Compte rendu - inauguration du cycle "Défense d'Aimer" au Forum des Images

13 mai 2013 | Alexis Rosier

 



Mercredi 2 mai au soir, un détachement spécial de la Croq’Team s’est rendu dans les galeries de salles obscures en fleurs de néons du Forum des Images afin d’assister à la projection inaugurale de son nouveau cycle, le très sobrement intitulé Défense D’aimer. En 100 films tout ronds, ce cycle au parfum de larmes, de sang et de roses fanées, qui s’étalera du 2 mai au 30 juin 2013, nous fait redécouvrir le cinéma sous le prisme de l’amour parallèle et maudit. Les infinies variations de l’amour contrarié vous seront montrées, de la nécrophilie à l’adultère, sans omettre la zoophilie et les passions sanglantes ... Aliénation la plus passionnante pour l’être humain et de l’être humain, tant celui-ci ne cessera jamais de s’en délecter, l’amour n’en demeure pas moins l’espace où la liberté humaine se manifeste sous ses formes les plus passionnées et les plus passionnantes.

Après la projection d’un truculent court-métrage animé de fin d’études réalisé par les étudiants de l’Ecole Gobelins qui mettait en scène un couple de poulpes menacé de se voir trancher les tentacules de son amour et qui contribua assurément à mettre dans le bain l’assemblée riante des spectateurs, venus nombreux malgré un temps au beau fixe, Isabelle Vanini et Laurence Briot, les programmatrices à l’initiative du cycle, ont choisi le film Meteora, projeté en avant-première avec l’accord de son distributeur, Potemkine Films, pour ouvrir le bal contrarié des amours autres.

 

Réalisé par Spiros Stathoulopoulos, ce long-métrage contemporain grec nous invite à la contemplation des plaines de Thessalie : de ses alpages méditerranéens, en chavirant par ses falaises escarpées aux verticales vertigineuses et de ses chemins secs où se lèvent de rares oliviers. Ce lieu extraordinaire aux multiples visages est le théâtre d’un amour au moins aussi extraordinaire entre une none et un prêtre orthodoxe, dont les monastères furent construits aux sommets d'impressionnantes masses rocheuses l’une en face de l’autre, aussi appelées Meteora.

 

 

 

Comme le titre du film l'atteste, l’amour qui nous est montré est un véritable météore : sa rareté captive jusqu'à l'hypnose. Le réalisateur ne tombe pas dans l’écueil qui serait de le raconter, ni dans celui qui serait de le suggérer, car le montrer, dans toute sa fadeur et sa tendresse crue, suffit. Toute mise en scène bannie, au point que certains passages évoqueraient presque le documentaire, le résultat est une image épurée, austère où viennent violemment jaillir à l’écran les rares éclats de couleurs clairsemant le film. Cette esthétique de l’austère n’en demeure pas moins d’une grave beauté, juxtaposant des tableaux d’un classicisme édifiant, qui ne sont pas sans ravivés à l’esprit toute une tradition picturale italienne. Le silence qui tapisse enfin les émotions des personnages nimbe le film d’une aura presque mystique : l'oeil silencieux de la caméra prend alors des expressions presque divines, tout jugement exclu..

Car Meteora raconte la déchéance par l’apothéose. Si le réalisateur a la morale de ne jamais trahir le mode de pensée, religieux, de ses personnages, qui sont tiraillés entre l’enfer auquel les condamne, pense-t-ils, leurs croyances et le paradis où les mènent leur amour naissant, le titre tend à une interprétation inverse, meteora signifiant en effet « ce qui s’élève » étymologiquement. Faudrait-il y voir, un Dieu plus grand que Dieu et qui aurait le nom d’Amour ? Les vas et vient entre la vallée et les cloîtres, descentes et remontées, chute et élévation, rythment ainsi le film comme une étrange et lancinante mécanique qui n’est pas sans évoquer celle du désir.



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